vendanges et vinification 2021 par Yannick Champ

C’est un plaisir de vous accueillir aujourd’hui dans la nouvelle cave du domaine qu’on utilise depuis le millésime 2017. Là on est à peu près un mois après la fin des vinifications du 2021 et comme on peut voir la cave est loin d’être pleine. C’est un millésime assez compliqué qu’on a eu à affronter et on finit avec une demi récolte en tout avec des vignes qui s’en sont mieux sorti que d’autres, on fera un petit point un peu plus tard là-dessus… L’année a commencé difficilement puisqu’on a eu un gros gel de printemps , si on peut appeler ça un gel de printemps car généralement les gels printaniers on est à -1 ou -2 degrés alors que cette année on a eu du -6 ne nous laissant aucune chance pour lutter que ce soit avec les éoliennes ou les feux de paille… quand on est à -6 on ne peut pas lutter. Donc on a perdu une grosse quantité de raisin, spécialement sur les blancs qui avaient débourré plus précocement mais aussi sur les rouges de façon très différente d’une parcelle à l’autre. Le gel c’est une chose mais ensuite on a eu une pluviométrie, je n’au oas encore les chiffres précisément mais c’est probablement une pluviométrie de l’ordre de celle de 2013 où on avait pris 1300 mm de pluie là où dans une année classique en Bourgogne on est plutôt à 800mm, ce qui fait un bon 50% supplémentaire. Il est probable que 2021 soit dans la même veine… ce qui a aussi des répercutions au niveau de la vigne, des maturités et des maladies. Il a fallu beaucoup trier pendant la vendange à cause des problèmes d’oïdium sur certaines parcelles. On a commencé les vendanges lundi 20 septembre avec un problème supplémentaire à additionner au gel et la pluie, c’est le manque de personnel. Maintenant que le domaine fait 21 hectares, on a besoin d’une équipe de 100 à 120 personnes et on était plutôt 50 ou 60… On a démarré le premier jour avec 27 coupeurs ! Donc c’est dire le déficit de main d’œuvre qu’on a eu… Ce qui a eu des répercutions très concrètes. Il a fallu donner la priorité à certaines vignes et en dégât majeur par exemple on n’a pas pu ramasser les gamay… C’est une petite vigne de 0,3 hectare mais quand il aurait fallu aller les vendanger les vendangeurs étaient occupés dans d’autres vignes de 1er cru ou grand cru et le jour où on a pu y aller c’était trop tard, l’oïdium avait tout emporté… Finalement on a eu de la chance de n’avoir qu’une demi récolte pendue dans les vignes car avec le peu de main d’œuvre qu’on avait, si on avait eu plus de raisin il aurait fallu sacrifier d’autres vignes ce qui aurait été terrible… Néanmoins les vendanges se sont bien passées. On avait une petite équipe mais une belle équipe agréable pour travailler. On a fait les vendanges en 10 jours ce qui est la même durée que 2020, sauf qu’en 2020 on était 120, ce qui montre bien qu’il n’y avait qu’une demi récolte. Ça s’est fait vite et bien même s’il a fallu un gros tri du à l’oïdium car on ne fait pas de compromis et on jette autant que nécessaire pour ne garder que des raisins parfaits étant donné qu’ici on travaille sans souffre dans les cuves et qu’il nous faut donc une qualité parfaite des raisins qu’on y met. Concernant la vinification, il n’y pas eu de gros défi, c’était même une année plutôt agréable du point de vue « stress » car on faisait suite à 3 millésimes très chauds avec des gros degrés d’alcool qui posent des problèmes sur les levures naturelles. Tandis que cette année on avait des degrés entre 11,5 et 12,5 et les levures travaillent plus facilement à ces températures et degrés que sur des millésimes très chauds. Donc vivification assez simple, d’autant plus qu’on avait la moitié des cuves qui étaient vides et on avait du temps à consacrer à chaque cuve. Comme toujours il y a de belles surprises : notre parcelle de Savigny a donné un superbe rendement. On est sur les hauts de Savigny « Dessus les Gollardes » et le gel semble avoir glissé sur le coteau et nous avoir épargné. C’est le plus beau rendement de cette année autour de 40 hecto hectare, ce qui est juste incroyable pour le millésime 2021. C’est une grande satisfaction car c’est une parcelle qu’on a reprise il y a 3 ans et sur laquelle on a fait un énorme travail dans la vigne qui a fait qu’on avait très peu de récolte en 18, 19 et 20. Et donc 2021 était la première année de production réelle sur cette parcelle et elle nous a gâté ! C’est la très bonne surprise… Après, dans les moins bonnes surprises, il y a le Clos des Varoilles, la toute nouvelle parcelle du domaine Gevrey 1er cru monopole sur près de 6 hectares car lorsqu’il y a manque de récolte sur une parcelle de cette taille ça se ressent fortement. On finit à 14 hecto hectare donc c’est pas loin d’être ridicule… Le clos des Corvées à côté, c’est un bon cheval ! On finit entre 25 et 28 hecto hectare donc pour le millésime c’est raisonnable… On aimerait toujours faire plus mais les conditions n’étaient pas réunies. Il a fallu là encore sacrifier le premier passage dans les vignes donc il n’y aura pas de cuvée « Le Clos des Corvées » faite avec les millerands parce qu’on n’avait pas la main d’œuvre et donc le temps pour consacrer 2 ou 3 jours supplémentaires à faire ce premier passage. Donc avec 2016 et 2020, ce sont les 3 millésimes pour lesquels on a du assembler l’intégralité des raisins pour faire une seule cuvée qui s’appellera « Clos des Corvée Vieilles Vignes »… Ici on a une rangée de Clos des Corvées. On a une deuxième rangée à côté mais bon, il manque un tiers de récolte… On a ici les Hautes Maizières, les Clous et la Goillotte qui tiennent malheureusement sur une seule rangée : on a un gros déficit sur Vosne-Romanée. Et puis une partie du Clos de Bèze qui est là avec aussi un petit rendement, on est sur une vingtaine d’hecto hectare… C’est service minimum en 2021 ! C’est évidemment trop tôt pour savoir ce que seront exactement les vins mais on est sur un millésime typiquement bourguignon sans ces degrés à 14 ou 14,5 , un millésime plus classique avec plus de fraicheur, plus de finesse et plus d’acidité. Un millésime qui va être je pense très sympathique et va probablement un peu bousculer les gens qui ont perdu l’habitude de la fraicheur classique. Le dernier millésime aussi frais était 2013, donc cela fait de nombreux millésimes où les gens sont habitués à avoir des vins plus chauds en Bourgogne et là on revient sur un millésime plus bourguignon, ce qui moi me réjouit… Comme je le disais sur les vins de ses dernières années, les hauts degrés d’alcool s’accompagnaient de couleurs très noires, sombres, denses, et là on renoue avec les couleurs d’antan des Bourgogne, ce qui n’est pas un problème mais qui risque de surprendre les plus jeunes amateurs qui n’auraient connus que des millésimes plus chauds, qui seraient venus à la Bourgogne ces quelques dernières années. Là ça va faire un gros gap !… L’équipe vigne a fait un travail remarquable dans des conditions épouvantables cette année, et c’est une vraie satisfaction pour moi de savoir qu’on a une équipe en béton capable de répondre à toutes les situations. En cuverie on avait une équipe de choc aussi. On a découvert des « petits nouveaux » comme Benjamin et Mélanie qui sont aujourd’hui tâcherons en charge du Clos des Varoilles à Gevrey, qui ont intégré l’équipe de vinification. Ce fut l’occasion de passer un peu de temps ensemble et d’apprendre à se connaître. C’était un travail pas facile moralement car quand on a la moitié des cuves vides on n’a pas vraiment l’esprit festif mais du coup on a eu du temps à passer ensemble et ce fut un vrai plaisir de ce point de vue. Tonio notre chef de cave a pris pleinement la main sur la cuverie cette année et ce fut un grand bonheur pour moi de passer la main, tout en l’accompagnant, mais comme un passage de témoin, un plaisir de le voir s’épanouir et diriger cette équipe qu’il a managé de main de maître… En tant que gérant du domaine, je me réjouis de voir les équipes s’épanouir et apparaître des leaderships… La continuité du domaine est pleinement assurée, c’est une vraie satisfaction.